Défense devant le Conseil Régional
de l'Ordre des Médecins

Docteur Le Cabellec




Docteur Louis-Marie LE CABELLEC
Petite Anse - Baie Mahault
97 127 DÉSIRADE
Tel : 05 90 20 01 93
Fax : 05 90 20 03 36

Pointe-à-Pitre, le 25 Novembre 96
A
Monsieur Le Président du Conseil
Régional de l'Ordre des Médecins
des Antilles Guyane
Espace Rocade Grand Camp
97 142 Abymes


O B J E T : Réponse à la plainte de Mme NIEGER.

Monsieur Le Président,

Suite à la lettre du Docteur Rénal ARIDITÉ, nommé rapporteur par votre conseil, veuillez accepter ces quelques remarques pour assurer ma défense.

Né à Ploya dans le Morbihan, j'ai suivi mes études à la Faculté de Médecine de Nantes où j'ai obtenu mon diplôme le 29 juin 77. Je me suis installé à Guide où j'ai créé un cabinet de groupe jusqu'en 95. J'ai vendu ma clientèle et j'ai cessé mon activité le 1er juin 95 pour reprendre la clientèle du Docteur DUPANT à la Désirade le 1er juillet 95. A la lecture de mon dossier transmis par le Conseil de l'Ordre des Médecins du Morbihan, vous aurez constaté que je n'ai jamais été un Médecin à problème.

Mon installation à la Désirade fût particulièrement chaleureuse d'autant que très rapidement nous avons dû subir une période cyclonique particulière IRIS- LUIS - MARYLINE. Les contacts humains sont décuplés du fait de la solidarité propre à notre insularité (privation d'eau, d'électricité, de téléphone, de moyens de transport...).

Rapidement à partir des mois d'octobre et novembre, je signale à Mme BUTHOLlER, infirmière de la DDASS (Actions Sanitaires - Maison Bandeau Circonvallation 97100 Basse-Terre), tous les lundis matin un nombre anormalement élevé de douleurs abdominales évoluant toutes sur le même tableau sans fièvre, sans nausée, sans diarrhée mais avec une FID (Fosse Iliaque Droite) nettement pathologique, siège d'une défense, voire d'une contracture.

Ne disposant d'aucun moyen pour réaliser des examens complémentaires biologiques ou radiologiques (les prélèvements sanguins n'étant assurés qu'une fois par semaine), les patients sont orientés vers la Guadeloupe, accompagnés par un certificat justifiant leur hospitalisation en milieu chirurgical et d'une lettre destinée au chirurgien, décrivant la symptomatologie et réclamant une mise on observation, des examens complémentaires et un traitement. Le malade ayant toujours le choix de l'établissement.

D'octobre à décembre inclus, première période, ce sont surtout des enfants en âge scolaire qui sont touchés par cette affection et essentiellement dans le quartier du bourg. Comme nous avions été privés d'eau, j'ai insisté sur des règles élémentaires d'hygiène :

  • Faire bouillir l'eau de citernes avec de l'eau de javel,
  • Maintien de la chaîne de froid.

Soeur Cécile Denise effectue à cette époque, des prélèvements à la cantine de Beau séjour, à la recherche d'une contamination alimentaire : résultats négatifs. En février, après avoir réalisé le recensement des enfants appendicectomisés auprès de Mme DULORME pour la maternelle, de Mer TREILLE pour le collège, la DDASS, dont la personne de Mme DOLOIRE, se déplace sur l'île pour visiter la cantine et les équipements scolaires...

En janvier, février et mars ce syndrome abdominale douloureux touche toutes les tranches de la population (enfants, adultes et vieillards) et tous les quartiers de l'île sauf les Galets.

Il faudra attendre le jeudi 4 avril pour que le Docteur MAILLE de la DDASS se déplace sur l'île, accompagnée d'un vétérinaire pour effectuer des prélèvements d'eau, à la recherche d'une bilharziose. Un œuf de bilharzie ayant été retrouvé dans un appendice d'un enfant du Désert, qui s'est révélé être en fait un œuf oxyder par la suite.

Progressivement, d'avril à juin, on assiste à une flambée de problèmes abdominaux et gynéco-urinaires qui trouve son accu en juin.

Madame le Docteur DE LACROIX remplace brutalement le Docteur MAILLE et se rend sur l'île où elle est très mal accueillie par une population en colère, excédée ou désespérée. Malgré ce mauvais contact, elle revient accompagnée par le Docteur RONDIN de la CLAM. Afin d'éviter tout problème, je vais les recevoir à l'aéroport pour leur faire visiter l'île. Ils étaient désireux de connaître les points d'eau sur Désirade car le diagnostique de bilharziose était toujours retenu : visite de la rivière dans le Nord (asséchée depuis peu après la création de l'île), de la petite rivière dans le quartier de Baie Mahault, ancienne marre actuellement recouverte par du béton. Ils n'ont pu que conclurent que Désirade était une île sèche et qu'il fallait abandonner les hypothèses de bilharziose, de yersiniose. Après une longue discussion à mon domicile, ils ont émis le vœux d'examiner la citerne qui nous sert de château et malgré ses talons hauts, Mme le Docteur DE LACROIX est montée sur Le toit du réservoir. De cette visite, il n'en a jamais été question, pas le moindre écho, pas de rapport !

Après la visite de ces deux médecins, une campagne d'examens (biologiques : NEFS, VS, CRI, sérologie bilharziose, yersiniose ... et coproculture, examens parasitologiques des selles) est entreprise. Elle devait être demandée et financée par ta DDASS, on fait dès le premier jour, on abandonne les sérologies et c'est mon tampon que sœur Cécile Denise utilise pour justifier la prescription en réclamant feuille de mutuelle et de Sécurité Sociale aux patients.

Nous sommes déjà en août et le phénomène a pris fin, les acteurs sont toujours en place, seul quelque chose change, les désiradiens ne consomment plus l'eau. Ils utilisent leur citerne et font bouillir l'eau avec de la Javel. Ils continuent par ailleurs de vivre et de s'alimenter comme toujours.

Le 11 août, je suis poignardé à mon domicile, le 12 août Madame NIEGER porte plainte auprès de votre Conseil... Il n'y a pas de problème de Santé sur la Désirade (Préfecture le 30 juillet 96).

J'ajouterai pour notre défense quelques remarques :
Pourquoi ne pas évoquer les autres malades opérés dans les autres cliniques ou au CHU ? Pourquoi ne pas parler des patients refoulés aux urgences du CHU par les internes de garde (familles T. de Baie Mahault, B. du Désert) alors qu'ils se présentaient avec une lettre destinée au Docteur STROBILE ou au Docteur S0W ? Pourquoi ne pas parler des dessous de table réclamés aux patients par certains chirurgiens qui venaient récupérer leurs honoraires lors de week-end à la Désirade (Docteur N. aux Familles E. et C. de Baie Mahault)?

Dans une petite île, comme la notre tout se sait et l'expérience malheureuse des uns est un brevet de conduite pour les autres. Le choix des désiradiens pour la Polyclinique tient à la gentillesse de l'accueil, le sérieux de l'hospitalisatIon et la rapidité des examens complémentaires. Une journée en Guadeloupe représente pour un îlien une dépense de 1000 frs : bateau 120 frs, voiture 200 frs, essence 100 frs, repas hébergement et autres frais pour être habillé décemment en Clinique.

Dans la lettre de Madame Lucia NIEGER du 13 Nov. 1996,

Article 40 :
a) avant l'apparition du VIA ou du virus Ebola, il n'y avait rien d'écrit dans la littérature. Il n'empêche que l'on s'en est bien inquiété.
b) Pourquoi ceux qui ont été hospitalisés sonnailles toujours en leucopénie (les V., T., E., ...) ?
c) Madame NIEGER a t-elle palpé les ventres, examiné les patients ? Avaient ils tous des problèmes psychologiques à 3 ans - 5 ans?
d) Pourquoi trente-neuf interventions ailleurs qu'à la Polyclinique ou au CHU ?

Article 13 :
N'ayant aucune étiologie à proposer pour expliquer le phénomène de cette flambée de troubles digestifs, gynécologiques, urinaires, dermatologiques, je n'ai fait que mettre en garde la population sur tous les risques attachés à notre insularité : eau des citernes, rupture de la chaîne du froid, contamination par les cabris et enfin ne consommer l'eau du réseau qu'après l'avoir additionnée d'eau de javel et l'avoir fait bouillir, ce qui permettait de tuer les vers qui sortaient des robinets.

Article 20 :
Il faut retenir certaines dates : Oct. - Nov. 95, début du phénomène seulement, du 15 janvier au 1er février recensement des cas d'appendicectomie chez les enfants de la maternelle et du collège. Le jeudi 4 avril, jeudi saint, passage du Docteur MAILLE et du vétérinaire sur l'île et enfin, en juillet, arrivée du Docteur DE LACROIX et du Docteur RONDIN, 10 mois d'attente. La consommation d'eau de Matouba de Capes ou tout simplement d'eau bouillie additionnée de Javel a permis à partir du mois de juillet, d'arrêter définitivement cette "épidémie" scandaleusement et ingénieusement appelée "épidémie d'appendicectomies" par les médecins du RNSP.

Il est dommage que dans un souci de sauvegarde de la Santé Publique, la DDASS n'est pas lait le nécessaire pour mettre en conformité un réseau de distribution d'eau, destiné à la consommation.
Il est dommage que dans cette île isolée sans moyens de communication avec le continent, il n'ait pas été mis en place un moyen de sauvegarde de la chaîne du froid.
Il est dommage et insuffisant qu'il ait fallu attendre la rupture de la canalisation sous-marine, il y a quelques jours pour venir en aide aux désiradiens. Moyens médiatiques superbes totalement inefficaces puisque l'eau transportée sur Désirade est rouillée, impropre à la consommation. Qu'est-ce que la distribution d'une bouteille de Matouba, 1 fois par semaine pour un nourrisson... ?

Je quitte la Désirade car je dois subir une péricardectomie à la suite de mon agression, c'est avec énormément de regret. Je pense y avoir rempli mon rôle de médecin le mieux que j'ai pu. Je ne quittais jamais mon île. Je ne pensais jamais aux congés, si ce n'est que pour accueillir ou raccompagner mes enfants lors des vacances. Je n'ai jamais failli à mon serment d'Hippocrate prêtée le 29 juin 1977 devant mes pairs à Nantes.


Louis-Marie Le Cabellec



Docteur Louis-Marie LE CABELLEC
Petite Anse - Baie Mahault
97 127 DÉSIRADE

Le 28 septembre 96
A
Monsieur Le Président du Conseil
Régional de l'Ordre des Médecins
des Antilles Guyane


Monsieur le Président,


Le Docteur Aridité a souhaité que je réponde à une rumeur grave à l'encontre du Docteur Manuceau et moi-même : une forfaiture, appelée par la DDASS, l'hypothèse économique.

Il ne m'avait jamais été donné l'occasion de rencontrer le docteur Manuceau avant le dimanche 21 juillet 96, où il est venu visiter la Désirade. Je n'ai jamais mis les pieds dans la Polyclinique, ni dans aucune clinique de Guadeloupe. Ce n'est que contraint et forcé que j'ai fait connaissance avec le CHU, transporté par le SAM., le 11 août 96. Je ne connais aucun médecin ni chirurgien guadeloupéen. Je ne suis associé à qui que ce soit, ni à quelqu'établissement que ce soit. Cette hypothèse tient de la malveillance et s'intègre dans le contexte de diffamation, dont nous avons fait l'objet au sein même de certaines administrations et ce dès le début du phénomène Désirade (n'étais-je pas le premier à signaler les cas tous les lundi matin à la DDASS ?).

L'agressivité de mes propos, visait de la DDASS et autres administrations, dans la presse, rend compte de l'ambiance et de la tension existant sur la Désirade : population en colère, excédée, fatiguée, déçue, impatiente et souffrante. Madame le Docteur De Lacroix a subi cette violence lors de son passage sur l'île. Pourquoi avoir attendu 10 mois avant de réagir. Je reconnais avoir été dur dans mes propos, mais c'était dans une situation intolérable, dans un souci de santé publique, face au silence et à l'inertie de l'administration et scandalisé par les propos de certains responsables de la DDASS dans les médias. Je n'ai fait que répondre aux attaques.

Le Professeur Philippe Hartemann, dit dans sa lettre du 4 nov. 96 :
"en revanche, je souhaite de tout coeur que cette escalade procédurière cesse afin qu'un climat apaisé puisse permettre un travail plus consensuel et qu'à ce problème médical puisse être trouvée une solution médicale et non judiciaire".

C'est dans cette même optique que je me suis rapproché de Madame Nicole Léry, responsable du service Droit Éthique de la Santé, à Lyon, et qui m'a assuré de tout son dévouement, car j'estime n'avoir jamais commis la moindre faute médicale ou déontologique. Je n'ai jamais eu d'autre souci que la santé des désiradiens.

Croyez Monsieur le Président, en mes sentiments respectueux.


Dr Le Cabellec