Résumé de l'affaire de la Désirade

Pour mieux comprendre la catastrophe de Santé Publique, qui a frappé les habitants de cette petite île (dépendance de la Guadeloupe dans les Caraïbes françaises), nous vous invitons d'abord à découvrir quelques faits sur la Désirade. Cette petite île de 24 km² (9 milles carrés) est à 9 kilomètres (5 milles.) au nord-est de la Point des Châteaux, séparée par le canal du même nom. Elle compte une population de 1620 habitants. La ressource principale est la pêche et le climat est sec et aride. Pratiquement toute l'eau est importée de la Guadeloupe continentale.

En février 1991, une canalisation sous-marine d'une longueur de 14 kilomètres est installée, pour transporter l'eau potable de la Guadeloupe continentale à la Désirade. Ce projet est financé par des fonds publiques et mené à bien, par une vingtaine de sociétés, toutes des filiales de la Générale des Eaux. Le 22 octobre 1991, le maire de la Désirade, Max Mathurin, qui a refusé de signer la réception des travaux, est assassiné sur la seule route de l'île qui longe sa côte sud. Il a été retrouvé criblé de balles, la langue coupée, la tête dans le sable et le corps brûlé. Ses assassins restent introuvables et les gendarmes ont laissé croire qu'il s'agissait d'une affaire de mœurs. C'est son beau frère, Emmanuel Robin, qui devient le nouveau maire et qui signe la réception des travaux. Il est important de savoir que ce dernier est en fait aussi un employé de la Générales des Eaux, filiale de Vivendi, ce qui est illégal.

En septembre 1995, la canalisation sous-marine se casse après le passage des cyclones Luis et Marilyn. Lorsque trois semaines plus tard, l'eau est rétablie, la crise de santé commence. En quelques mois, plus de la moitié de la population sera victime de douleurs abdominales et des problèmes de peau. De plus, des vers apparaissent dans l'eau des robinets des Désiradiens (trois ont été analysés). Entre septembre 1995 et juillet 1996, 230 habitants et plusieurs touristes ont été opérés d'appendicites, dont 70 pour le seul mois de juin ! En début juillet 1996, l'épidémie se réduit brutalement. La raison en est, que le seul médecin de l'île, le Dr Louis-Marie Le Cabellec, avait demandé à la population de ne plus boire l'eau du robinet. Le Docteur Jérôme Manuceau, chirurgien à Pointe-à-Pitre, a réalisé 80% des appendicectomies. Il a fait faire une analyse histologique de tous les appendices enlevés. TOUS sauf un, présentaient des lésions. Par comparaison, il est admis qu'un tiers des appendices enlevés en France sont sains !

Le 11 août 1996, le Dr Le Cabellec est victime d'une tentative d'assassinat. Un poignard de 40 cm de long a traversé sa poitrine, de part en part. Il a miraculeusement survécu.. Les gendarmes ont conclu en moins d'une semaine, que c'était " une tentative de suicide à but publicitaire pour défendre sa cause ". Le médecin légiste qui l'a examiné, a contredit cette hypothèse.

Lorsqu'en février 1997, les autorités préfectorales ont orchestré une vaste campagne médiatique en faveur de la qualité de l'eau distribuée à la Désirade, une deuxième épidémie a été déclenchée, malgré l'absence du Dr Le Cabellec (il n'exerce plus à cause de l'importance des séquelles). Cette deuxième épidémie s'est arrêtée, lorsque le Dr Manuceau, au moyen des médias, a demander aux Désiradiens d'arrêter la consommation de l'eau du robinet.

› Les autorités sanitaires alertées depuis le début (octobre 1995), par le Dr Le Cabellec, ont prétendu que l'eau ne pouvait pas être en cause. L'explication officielle est que les Désiradiens ont été victimes d'une " psychose collective ", provoquée et entretenue par les Drs Le Cabellec et Manuceau, pour des raisons mercantiles. Cette thèse publiée par le Figaro, a été condamnée par le Tribunal Correctionnel de Paris, pour diffamation. Ce jugement a été confirmé par la cour d'Appel de Paris.

En 1999, un institut privé, l'Institut Jean Daucet a été chargé de mener une enquête de santé publique à la Désirade. Nous n'avons jamais su qui était le commanditaire de cette enquête. Le Professeur Camille Berchel, lui-même désiradien et chef de service du Service de Pédiatrie de l'Hôpital de Pointe-à-Pitre, a été associé à cette enquête. C'était un homme droit et qui n'avait pas peur de dire ce qu'il pensait. Il a été retrouvé un matin de décembre 1999, brûlé dans sa voiture en stationnement, tranquillement assis derrière son volant. La gendarmerie a évidemment conclu à un " suicide par le feu, à cause d'une dépression ", alors que de toute évidence il était mort avant que l'on ne mette le feu à la voiture. Les résultats de l'autopsie son restés secrets, et son corps a été incinéré. Après ce décès et devant l'hostilité de la population, l'Institut Jean Daucet a finalement renoncé à son enquête.

› Ainsi, les violences et les morts violentes de personnalités plus ou moins liées à l'eau ou à la Santé Publique de la Désirade sont, soit des suicides, soit des affaires de mœurs non élucidées. Pour rechercher une explication à tout cela, il faut avoir en tête, quelques faits :

  • Le frère du Préfet de Guadeloupe de 1995-1996, était le numéro trois de la Générale des Eaux .
  • Le Maire de la Désirade, était un employé de la Générale des Eaux ce qui est interdit par la loi. Il était aussi membre du SIAEG (Syndicat Intercommunal d'Alimentation en Eau et d'Assainissement de la Guadeloupe) et du Conseil Général. Son frère était le responsable de la distribution de l’eau, sa sœur la secrétaire, donc tous deux employés de la Générale des Eaux. Sa femme était l’employée de la DDASS, chargée des prélèvements d’eau, pour l’analyse par l’Institut Pasteur.
  • Contrairement à ce qu'autorise la loi, nous n'avons jamais pu consulter les documents concernant les travaux prévus, pour l'adduction de l'eau à la Désirade, ainsi que ceux effectivement réalisés et leur financement. Visiblement, les autorités ont des choses à cacher.

Le Dr Manuceau, après le Dr Le Cabellec, a été contraint de quitter la Guadeloupe. Il est poursuivi par les autorités sanitaires qui cherchent à lui faire interdire l’exercice de la chirurgie :

En 1996, le Ministère de la Santé dépose une plainte contre le Dr Manuceau pour "Violences ayant entraînés des mutilations et infirmités permanentes". Ce dernier obtient facilement un non-lieu. Devant ce fait et le jugement du Figaro, le Ministère de la Santé renonce aux poursuites judiciaires et préfère attaquer le Dr Manuceau devant les instances administratives qu'elle contrôle, à savoir, la Sécurité Sociale et l'Ordre des Médecins. Il obtient dans un premier temps, de l'Ordre des Médecins qu'il lui inflige un "blâme", concernant l'affaire de la Désirade. Ce blâme est confirmé par le Conseil d'Etat en 2003. Parallèlement il fait venir en Guadeloupe un de ses médecins conseils, qui monte un dossier en 1997 sur les pratiques médicales du Dr Jérôme Manuceau et conclut à des "opérations multiples non justifiées et de nombreuses irrégularités administratives". Précisons qu'aucun patient n'a accepté de porter plainte contre le Dr Manuceau, bien qu'ils aient été invités à le faire. Cette deuxième plainte a été portée devant la Section des Assurances Sociales du Conseil National de l'Ordre des Médecins. Cette instance est un merveilleux instrument pour l'Etat, lui permettant de mettre au pas tout médecin récalcitrant. Ainsi, le Dr Manuceau est condamné le 27 septembre 2005 à l'interdiction de soigner les assurés sociaux pendant toute l'année 2006.

En 1998, on découvre que non seulement l'eau de la Désirade est polluée, mais aussi celle de la Guadeloupe : des pesticides sont retrouvés à des taux très élevés, la majorité des canalisations de l'eau potable sont en ciment-amiante. Serait-ce l'explication du taux plus élevé de cancers en Guadeloupe, par rapport à la France Métropolitaine ?

En Mars 2003, les associations de consommateurs guadeloupéens et désiradiens, ont déposé des plaintes contre l'Etat pour empoisonnement par l'eau, non assistance à population en danger et non respect du principe de précaution.